Y a-t-il un pilote dans le kaizen ?

X — Cela fait bientôt 3 mois qu’on travaille sur ce kaizen, et j’ai l’impression que, depuis le début, tu sais exactement là où je vais attérir avec mes recherches alors que moi, j’ai l’impression de pédaler dans la semoule.

Moi — Pas tout à fait.

X, accusateur — Mais quand même plus qu’un peu !

Moi — Certes : j’ai bien une idée de la direction dans laquelle on va avancer ensemble lors de ces gambas réguliers mais ce n’est pas tellement un résultat en particulier que je cherche.

X, interrompant — Ne me dis pas que tu me fais travailler pour « rien ».

Moi — Non plus, en fait je tente de te donner des perches, comme un maître nageur qui enseigne la natation : si je nage à ta place, j’arriverai bien au bout du bassin mais tu ne sauras pas nager pour autant; si je te donne des perches trop solides, tu apprendras à te laisser tirer; si je ne te donne aucune perche, tu peux vite couler. C’est loin d’être si facile de faire progresser les gens.

Maître nageur au bord d'une piscine vide

X — Et si je n’ai pas envie de nager ?

Moi — Le Lean part du principe que les gens ont envie de s’améliorer et d’apprendre. Et il fournit tout une gamme d’outils et de techniques pour y parvenir.

X, sceptique — Ça doit quand même être un peu troublant quand on se sent « piloté » de l’extérieur.

Moi — C’est pourquoi la confiance et le respect mutuel font parti du socle de la maison du TPS. Sans ça, on n’y arrive pas. Et même avec ça, ce n’est pas certain qu’on y arrive : être « cool » l’un avec l’autre est loin d’être suffisant pour progresser.

X — C’est sûr que je n’ai jamais vu de table de ping-pong ici !

Moi — Mais peut-être que tu préférais un « management objectif », avec des chiffres bien calés en début d’année et une simple courbe dans un fichier Excel pour marquer la différence entre réussite et échec.

X, vexé — Je n’ai jamais dis ça !

Moi, taquin — Je sais bien, je pousse juste un tout petit peu le raisonnement : le mode financier est tellement imprégné dans nos habitudes qu’on est parfois bien en peine de le débusquer.

X — On a quand même vite dérivé : comment est-on passé des mesures que je dois faire chaque semaine à ces remarques si générales sur l’économie ?

Moi — N’importe quel système complexe veut ça : tout y a une influence sur tout. Et la vie d’une boîte n’y échappe pas : il suffit d’un client, d’un fournisseur, d’un salarié ou même d’une réglementation pour tout faire tanguer. Et le Lean apporte une boussole et une carte assez robuste pour y naviguer sereinement. C’est cette sérénité qui permet d’anticiper assez pour avancer ensemble dans la bonne direction, celle qui résout les problèmes des clients et qui tient compte du contexte général.

X — Je n’avais jamais vu mon kaizen comme l’antidote à la carotte et au bâton !